Article publié le 1/08/24 et mis à jour le 13/12/2024.

Le Comité national de la promotion de l’œuf (CNPO, Interprofession française de l’œuf qui rassemble les accouveurs, producteurs, professionnels de l’alimentation animale, transformateurs et distributeurs) a récemment annoncé son nouveau plan de filière à 2030. Elle fixe de nouveaux objectifs en matière de bien-être animal avec un objectif d’atteindre 90% de poules élevées en systèmes alternatifs à la cage (sol, plein air, label rouge et biologique) en 2030. Des avancées à saluer, néanmoins il reste de nombreux défis pour le bien-être animal. En effet, la filière mise sur l’augmentation du nombre de poulaillers conventionnels en France, et le nombre de poules plein air, en label rouge et bio, a diminué au cours des 2 dernières années au profit de l’élevage au sol. Une tendance que nous appelons la filière à revoir, par des accompagnements ciblés sur ces alternatives plus respectueuses du bien-être animal.

Des avancées et engagements positifs vers le hors cage

Fin juin 2024, dans son nouveau plan de filière, le CNPO s’est fixé de nouveaux objectifs hors cage : atteindre 90% hors cage en 2030. La filière française avait atteint en fin 2023, 73 % des poules pondeuses élevées hors cage, dépassant ainsi l'objectif de 2017 fixé à 50 % pour 2022. CIWF France salue les nouveaux engagements de la filière mais espère que la France atteindra le 100% hors cage avant 2030 grâce aux engagements des entreprises françaises et aux avancées législatives européennes, et ainsi rejoindre l’Allemagne qui interdit les cages dès 2025.

Des investissements importants pour de nouveaux poulaillers

Pour répondre à ces ambitions, la filière prévoit d’investir 300 millions d’euros pour construire 300 nouveaux poulaillers d’ici 2030. Ces investissements visent à soutenir la transition vers des systèmes d’élevage hors cage.

Elle s’appuie sur une augmentation forte des niveaux de consommation. En 2023, la production française d’œufs a atteint près de 15 milliards d'œufs en 2023 (+4 % entre 2022 et 2023), ce qui place à nouveau la France au premier rang des producteurs européens. Cette tendance est liée à la consommation d’œuf qui continue de croitre également, 5,2% au cours des quatre premiers mois de 2024 par rapport à 2023.

L'augmentation de la production, couplée à une transition vers des systèmes hors cage, soulève la question de l'impact sur le nombre total de poules. En effet, avec l'augmentation de la production souhaitée par la filière, le nombre absolu de poules élevées en cage pourrait ne pas diminuer autant qu'espéré.

De plus, il est préoccupant de constater que, malgré les efforts déclarés pour réduire les élevages en cage, le pourcentage de poules élevées en cage est passé de 23 % en 2022 (d’après un dossier de presse du CNPO paru en 2023) à 27 % en 2023, toujours selon le CNPO, voire 28 % selon l'ITAVI. Pourtant, la filière enregistre une augmentation de la production de 4% entre 2022 et 2024. Cette hausse est d'autant plus inquiétante que la loi française interdit la mise en production de nouveaux effectifs d poules en cage.

En réalité, une baisse globale de la production entre 2021 et 2022 due notamment à l’influenza aviaire, suivie d’une reprise partielle en 2023 a entraîné une augmentation de la proportion d’œufs issus de poules en cage, mais non de l’effectif de poules en cages. Celui-ci semble continuer de baisser mais à moindre allure. Cela soulève néanmoins de sérieuses questions sur l'efficacité des mesures mises en place et la volonté réelle de la filière à s'engager dans une transition durable et éthique.

Ce contexte met en lumière la complexité des dynamiques de production et souligne la nécessité d'une vigilance accrue pour garantir que l’augmentation de la production ne se fasse pas au détriment du bien-être animal.

De fortes inquiétudes sur le Label Rouge et le Bio.

Autre point d’inquiétude important, la filière semble ne pas avoir l'intention de redynamiser les marchés du Label Rouge et du bio, se contentant de maintenir les élevages actuels dans ses objectifs. Actuellement, les œufs Label Rouge et bio représentent respectivement 5,9 % et 13,6 % de la production totale d’œuf. Ils étaient pourtant à 6,4% pour le label rouge et à 15,7% pour le Bio en 2022.

Pourtant, ces modes de production mériteraient d'être soutenus et développés, pour garantir un potentiel de bien-être animal significativement supérieur.

Afin de soutenir ces productions alternatives à la cage, CIWF France participe à l’initiative d’étiquetage sur le bien-être animal, l’Etiquette bien-etre animal (EBEA), afin d'informer les consommateurs et citoyens sur les modes de production et leur niveau de bien- être animal. L’EBEA va bientôt être affichée sur les œufs, avec un référentiel qui est en cours de finalisation pour les poules pondeuses. Cette grille spécifique pour les poules pondeuses sera bientôt disponible sur les produits en magasin. Nous encourageons fortement la filière à adopter et promouvoir cette étiquette, car elle représente un outil précieux pour améliorer les conditions de vie des animaux, renforcer la transparence envers les consommateurs et soutenir les producteurs qui s’engage sur des modes d’élevage hors cage et plein air.

La filière française œufs: cap vers le hors-cage mais des écueils à éviter