La loupe

Pangolins et pandémies

News Section Icon Publié 25/02/2021

Alors que la pangolin a été accusé d'être la cause de la COVID-19, attirons l’attention de la communauté mondiale sur les tragiques circonstances qui entourent cette créature magnifique et unique, circonstances engendrées par l’humanité qui entraînent cette espèce timide et paisible vers une extinction pratiquement assurée.

Peu de personnes ont vu un pangolin, ce mammifère squameux apparenté aux fourmiliers et aux tatous, mais huit espèces sont présentes sur deux continents : l’Afrique et l’Asie. Ils ont le triste privilège d’être le mammifère qui fait l’objet du plus grand trafic mondial. En 2019, selon les estimations, 195 000 pangolins ont été victimes du trafic en raison de leurs écailles (Challender, et. col., 2020).

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Crédits : Unique Safari Eye

Dans les marchés de consommation d’Asie, la viande de pangolin est considérée comme un mets fin. Ses écailles sont utilisées dans la médecine traditionnelle et les remèdes populaires pour traiter un éventail de maux, de l’asthme aux rhumatismes et l’arthrite.  Bien que les écailles de pangolin soient en kératine, tout comme nos ongles, elles sont utilisées dans la médecine chinoise depuis des siècles. Aucune vertu médicinale n’a jamais été démontrée.

Il est difficile d’imaginer que, selon l’African Pangolin Working Group (« Groupe de travail africain sur le pangolin »), rien qu’en 2018, 48 tonnes d’écailles de pangolins africains ont été interceptées par les autorités asiatiques. Quarante-huit tonnes !  C’est un chiffre inquiétant, quand on sait que chaque pangolin a seulement 70 écailles très légères et que 48 tonnes représentent seulement une partie des écailles braconnées.

La cruauté subie par les pangolins dans le cadre de ce trafic est immense. Après leur capture, ils sont souvent retenus en captivité pendant une semaine ou dix jours sans nourriture, et placés dans n’importe quoi, de sacs en plastique à des récipients remplis de bière artisanale, comme c’était le cas d’un des pangolins africains.  On ose à peine imaginer les méthodes cruelles utilisées pour les tuer ou pour les dépouiller de leurs écailles.

Au début de l’année 2020, le pangolin est apparu au cœur de l’origine de la pandémie.

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Poules, colombes et canards enfermés dans des cages lors d’un marché d’animaux vivants dans les rues de Shanghai, Chine | Crédits : Monica Ninker

Alors que les enquêtes sur l’origine de la COVID-19 se poursuivent, la source soupçonnée était le marché de gros des fruits de mer de Huanan, à Wuhan, qui comportait une section d’animaux vivants où étaient vendues de nombreuses espèces d’animaux sauvages et d’élevage. Bien que les chauves-souris soient considérées comme la source originale, les scientifiques conviennent que les virus mortels ont plus de possibilités de passer d’un animal à un être humain par le biais d’un hôte intermédiaire, probablement le pangolin.

Ce mécanisme présente de fortes similitudes avec d’autres virus issus d’une voie différente (l’élevage industriel), tels que les souches très pathogènes de grippe aviaire ou de grippe porcine. Les effets de ces maladies se sont avérés dévastateurs, provoqués par l’élevage d’êtres sensibles et vivants (poulets et porcs) dans des conditions contre nature : enfermés dans des cages, entassés et confinés dans des exploitations intensives.

Même si les confinements dus à la COVID-19 dans les pays africains ont entravé le trafic du pangolin, celui-ci n’a pas cessé.

Malgré la pandémie, le trafic d’animaux sauvages est le quatrième trafic le plus lucratif à l’échelle mondiale, contribuant directement à la crise de la biodiversité.  Comme l’explique le professeur Ray Jansen de l’African Pangolin Working Group : « Les pangolins n’ont pas d’ennemis naturels.  L’être humain amène sa ruine. »

Somme toute, il est important de ne pas oublier que les pangolins sont une espèce clé.  Ils sont inextricablement liés à notre écosystème et sont essentiels à l’équilibre de la biodiversité sur notre planète.  Selon Ghislain Ngongo Njibadi, écoguide travaillant au Gabon, en Afrique de l’Ouest : « Si cette espèce disparait, certainement la forêt mourra aussi. »

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Sophia Zhang, employée de la Fondation chinoise pour la conservation de la biodiversité et le développement vert (CBCGDF), prélève des échantillons de sécrétions nasales et buccales à des fins d’analyse auprès du pangolin appelé Lijin du Centre de sauvetage pour animaux sauvages de Jinhua dans la province du Zhejiang, à l’est de la Chine. (CBCGDF via AP)

Le moment est venu de mettre fin à cet empiètement sur les habitats sauvages à des fins commerciales, impulsées par l’appât du gain et le profit.  De mettre fin à l’exploitation et à la persécution d’animaux sur la base de mythes, et de nous rendre compte que le fait de détenir des animaux, qu’ils soient sauvages ou d’élevage, entassés et enfermés dans des cages dans des conditions stressantes génère des circonstances propices à la maladie. Que ce soit les pangolins ou un cochon d’élevage industriel, les conditions cruelles qu’ils subissent ne sont pas seulement inhumaines, elles représentent une menace grave pour la santé mondiale.

Si la pandémie, et les pangolins mis en évidence par la suite, nous ont appris quelque chose, c’est bien que la protection des êtres humains est indissociable de la protection des animaux.  Traiter les animaux avec compassion doit être un principe fondamental dans une société durable. Ainsi, nous protégerons notre planète pour les générations à venir.

Philip Limbery
Directeur international de CIWF

 

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